« Pantagruel » fait de la RÉSISTANCE

1940, octobre Une histoire courte qui évoque celle de toute la presse clandestine, dont l'essor reste stupéfiant si l'on songe aux difficultés qu'elle a rencontrées.

La Bibliothèque nationale de France recèle, parmi ses trésors, les seize numéros d'une des publications les plus éphémères et les plus emblématiques qui soient. Il s'agit de Pantagruel, qui a la gloire d'avoir été, d'octobre 1940 à octobre 1941, le premier périodique clandestin de la Résistance. Son rédacteur, unique, est Raymond Deiss. L'homme est issu d'une famille alsacienne. Pianiste doué, il a formé son talent en Allemagne mais s'est engagé du côté français dans la Grande Guerre. Il est capable d'enthousiasmes désordonnés et généreux. Son filleul, Robert Cusin, raconte qu'il s'est « passionné pour l'aviation, l'astronomie, l'occultisme, la navigation de plaisance… » Éditeur et imprimeur de musique rue Rouget-de-Lisle (adresse prémonitoire…), dans le Ier arrondissement de Paris, il a contribué à la notoriété d'Arthur Honegger, de Georges Auric, de Darius Milhaud, dont il a publié Scaramouche , et de Francis Poulenc avec son Concerto pour orgue . Deiss utilise les services de deux linotypistes complices, René et Robert Blanc, et il effectue lui-même le tirage de Pantagruel sur ses propres presses, en offset. La diffusion, d'une dizaine de milliers d'exemplaires, est assurée en partie par le mouvement Armée des volontaires, qui naît au même moment, dont les militants organisent par ailleurs des filières d'évasion pour des prisonniers de guerre et la collecte de renseignements. Le reste du tirage est adressé par la poste à des « personnes relevées au…