L’un de nous deux
Mandel – Je crains plutôt Pétain, si nous lui sommes livrés.
Il nous hait, vous et moi, et toute sa camarilla avec lui. II vous hait parce que c'est l'armée qui a perdu la guerre, et pas le Front populaire et parce qu'il sait que vous le savez. Il me hait parce qu'il avait pu me croire de son camp, avant la guerre, et parce que je lui ai fait manger son chapeau, à Bordeaux, en juin 40. Il m'avait fait arrêter en se fondant sur la dénonciation d'un salopard. Je l'ai obligé à s'excuser, par écrit.
Cela ne s'oublie pas. Hitler peut calculer de sang-froid, pour ce qui nous concerne. Mais pas Pétain… Quelqu'un a dit que les intérêts transigent toujours, les passions jamais. Sous son enveloppe de fausse dignité, ce vieillard n'est plus qu'obsédé de lui-même, remâchant ses haines recuites. Ah oui, décidément, mauvaise impression.