L’injure en politique : de tout temps ?

Concordance des temps – émission du 3 mars 2012

>> La page de l'émission sur le site de France Culture

Avec Thomas Bouchet.

Les historiens sont souvent invités, par les temps qui courent, à resituer les émotions de la campagne présidentielle actuelle dans la longue durée de notre histoire politique, et cela vaut en particulier pour la tonalité des affrontements. Ceux-ci étant souvent virulents, on tend parfois à penser que les agressions verbales sont aujourd’hui d’une violence sans précédents. C’est évidemment à voir de plus près.

Nous allons donc considérer ce matin ce qu’ont été les injures en politique au cours des deux siècles qui ont précédé le nôtre. Thomas Bouchet, mon invité, chercheur en histoire contemporaine à l’université de Bourgogne, a travaillé sur ce thème et publié un livre qui s’intitule, il fallait s’y attendre, « Noms d’oiseaux ».

Esope le fabuliste nous a averti, voilà bien longtemps, au sixième siècle avant Jésus Christ que « les injures que nous infligeons et celles que nous subissons se pèsent rarement à la même balance ». C’est bien ce qui rend difficile l’appréciation du poids des insultes en chaque occurrence historique, et l’interprétation de leur portée, de ce qu’elles ont à nous dire sur la nature des combats dans le forum et sur leur efficacité plus ou moins cathartiques.

Cristallisent-elles significativement des rivalités et des haines, remplacent-elles ou nourrissent-elles les brutalités physiques, renseignent-elles sur des équilibres ou sur des déséquilibres sociaux ? De belles questions en somme à propos des dévergondages de la passion et des dérapages du sang-froid.

Jean-Noël Jeanneney

Cette émission a été enregistrée le 23 février 2012.