« LE TEMPS DE PARIS » veut couler « Le Monde »

Feuilleton, L'Histoire n°364 Mai 2011.

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1956, 17 avril Le but était d'abattre le journal de Beuve-Méry, jugé trop à gauche. Le lancement du Temps de Paris par Antoine Pinay, soutenu par des hommes d'affaires dispendieux, sera un fiasco.

Douze ans après la Libération, la droite et les milieux « modérés » ne s'en consolent pas : non seulement Le Monde leur paraît avoir, en décembre 1944, profité du cynisme des résistants et du soutien malvenu du général de Gaulle pour s'installer en coucou dans les meubles du Temps d'avant-guerre, mais il aurait depuis lors abusé de sa posture héritée de « journal de référence » pour prendre des positions néfastes aux intérêts nationaux. En politique étrangère, Le Monde s'attache à défendre le « non-alignement » entre les deux blocs, une atteinte insupportable à la solidarité atlantique, et il montre de la complaisance envers la révolte des colonisés de l'autre côté de la Méditerranée, se refusant à soutenir les partisans de l'Algérie française. Ajoutez que son directeur Hubert Beuve-Méry a décidément la nuque bien raide et témoigne, à l'égard de toutes les séductions du « gros argent », d'un tempérament farouche qui ne laisse pas d'irriter. Un temps, sur ces bords, on a pu espérer investir la forteresse de l'intérieur. En 1951, une tentative de coup de force s'appuyant sur la bonne foi de l'économiste libéral René Courtin, l'un des fondateurs du Monde en 1944, et sur la prétention du MRP, le parti des démocrates-chrétiens, englué en Indochine, à retrouver l'emprise qu'il avait cru s'assurer sur le journal en 1944 a failli évincer Beuve-Méry ; mais celui-ci a été sauvé in extremis par la mobilisation de ses lecteurs et de ses journalistes, et par le soutien de De Gaulle lui-même. …