La République brandit ses emblèmes

Lanouvellerepublique.fr, le 22 octobre 2012

Bernard Richard publie “ Les emblèmes de la République ”, et Jean-Noël Jeanneney “ La République a besoin d’histoire ” : Marianne a besoin de Clio !

Doit-on mettre une cravate ? Ce symbole facile de la bienséance remonte en fait à Louis XIV, avec la venue de Croates revêtus de leurs oripeaux distinctifs, rappelle Bernard Richard. D'où la « Croate » devenue « cravate » !

Mais parlons plutôt de République. Ah, son drapeau, en voilà un symbole. Jean-François Copé en truffe la couverture de son dernier livre. Peut-être aurait-il pu y inscrire des pains au chocolat susurre un humoriste ! Et la Fête nationale ? « Rien dans le décret de 1880 n'indique qu'on commémore plus le 14 juillet 1789 que le 14 juillet 1790, jour de la fête de la Fédération. On peut ainsi penser à un moment sanglant, ou un moment de réconciliation. »

Et l'hymne national ? Qu'on le chante (ou non) qu'on le siffle (ou non), voilà qui montre qu'il représente à tout le moins un enjeu. Et ses paroles sanguinaires ? « J'étais responsable de la célébration du bicentenaire de la Révolution » se souvient Jeanneney. « J'ai reçu l'abbé Pierre qui regrettait les paroles " qu'un sang impur "… Or, je crois qu'il ne faut pas les changer. Elles ont été chantées à un moment par les soldats de la Révolution en lutte contre les royaumes d'Europe qui voulaient les écraser. Sang bleu, sang impur, cela ne vise que cela. » C'est donc ce moment héroïque qui est chanté, et statufié, sachant qu'il ne vise de nos jours aucune nation, aucune ethnie, aucune confession.

Richard ajoute : « La Marseillaise était l'hymne d'Allende au Chili, avec des paroles espagnoles naturellement. Et naturellement, cet hymne était interdit. Aussi des soldats de la junte ont-ils connu un moment de stupéfaction en entendant qu'on le jouait à l'ambassade de France ! »Cette Marseillaise, en fait, appartient à tous : elle est souvent devenue le chant de ralliement des peuples secouant le joug de l'oppression.

Nous avons encore le coq, arrogant et vaniteux, à la fois ridicule et sympathique. A ne pas confondre avec le coq qui se pavane en haut du clocher des églises. Celui-ci symbolise Dieu veillant sur la population.

Moins drôle, les monuments aux morts. Eux aussi n'échappent pas aux passions des factions. Suivant la sensibilité d'une ville, on le rapproche de l'église, ou on l'en éloigne. Certains ont voulu que ce monument de douleur et de deuil prenne l'aspect d'un Christ Roi… Et les rares villages qui n'ont pas eu de morts sont morts… de honte !

Journaliste au monde, Philippe-Jean Catinchi fut un spirituel modérateur.

distinction

Prix Augustin-Thierry : Créé pour perpétuer le souvenir de l'historien et homme de lettres, le prix Augustin-Thierry a été décerné à Ivan Jablonka pour son ouvrage « Histoire des grands-parents que je n'ai pas eus ». Ce livre très pointu, qui conte l'histoire d'un couple de militants juifs communistes en Pologne, a nécessité de la part de l'auteur un énorme travail de recherches, et de nombreux voyages à travers le monde. Une histoire pleine de tendresse et de poésie.

Le grand prix RVH : Historien et politiste, Romain Bertrand est le lauréat 2012 du Grand prix des Rendez-vous de l'Histoire pour son ouvrage L'Histoire à parts égales. Le jury a récompensé « un livre audacieux, riant, original » dont l'action se situe à Java au début du XVIIe siècle, dans le milieu des marchands néerlandais. « Un livre d'une grande érudition qui offre le récit détaillé des premiers contacts entre Hollandais, Malais et Javanais. »

Alain Vildart