Heurs et malheurs du puritanisme anglais
Chacun sait bien que la pudeur britannique n’est plus ce qu’elle était, mais tout de même – tout de même… La traditionnelle exclamation « Oh ! Shocking ! » a pu s’entendre Outre-Manche lorsque Internet a diffusé à partir d’un magazine français les photos de Kate Middleton, duchesse de Cambridge, future reine d’Angleterre, les seins nus lors de vacances dans le sud de la France et plus encore les photos du prince Harry, second fils du prince Charles, entièrement dénudé en compagnie d’une jeune fille se montrant elle-même dans le plus simple appareil, scène qui s’est déroulée à Las Vegas, à l’issue d’une partie de strip-poker. « Oh ! Shocking ! » Nul n’a pu se défaire de l’idée que l’ancêtre des princes William et Harry, la reine Victoria, avait dû se retourner dans sa tombe, à voir ainsi bafouées toutes les règles du puritanisme qu’elle avait incarnées, au cours d’un règne de 64 ans. Ces règles qu’elle avait héritées, en les intensifiant peut-être, des protestants des siècles anciens. Et c’est ainsi que m’est venu l’idée qu’il serait intéressant de considérer l’histoire de ce puritanisme en se portant bien plus loin en arrière jusqu’aux XVIe et XVIIe siècles, et en se demandant si vraiment il n’en reste rien dans la Grande-Bretagne contemporaine, en élargissant la curiosité aussi aux Etats-Unis d’Amérique, puisque les premiers pèlerins, ceux du Mayflower, comme leurs successeurs au long du XVIIe siècle, étaient profondément marqués par cette sensibilité, par les doctrines qu’elle accompagnait, par les comportements qu’elle impliquait, par les rigueurs qu’elle exigeait. Bernard Cottret, professeur à l’Université de Versailles Saint Quentin, où il enseigne l’histoire des civilisations anglo-saxonnes, et membre de l’Institut Universitaire de France, va nous guider dans cette exploration.
Jean-Noël Jeanneney