Célébration ou commémoration : le cas Céline

Interview pour le magazine L'Histoire, à propos du retrait du cinquantenaire de la mort de Louis-Ferdinand Céline de la liste des célébrations nationales.

D’abord inscrit sur la liste des célébrations nationales de 2011, le cinquantenaire de la mort de Louis-Ferdinand Céline a finalement était retiré de ladite liste par le ministre de la Culture Frédéric Mitterrand. Vous faites partie du Haut comité aux Célébrations nationales. Qu’en pensez-vous ?

Depuis assez longtemps j’avais fait observer au Haut Comité (qui n’est que consultatif…) qu’il serait toujours en position inconfortable s’il ne suggérait pas aux autorités responsables de distinguer, dans son titre, « célébrations » et « commémorations ». Il est opportun, cela tombe sous le sens, de célébrer l’Edit de Nantes et de commémorer sa révocation, de célébrer la déclaration des droits de l’homme d’août 1789 et l’œuvre législative magnifique de la Convention et de commémorer la Terreur. Et ainsi de suite.

Si le ministre m’avait consulté, je lui aurais suggéré, plutôt que de revenir, avec éclat  et contrition, sur la place de Céline –grand écrivain et antisémite infâme-  dans la brochure annuelle qu’il avait préfacée, d’annoncer cette modification de l’intitulé du Haut Comité. Ainsi aurait-on évité de paraître répondre, en commémorant le personnage sans le célébrer,  à un souci communautariste en direction du CRIF (auquel le chef de Etat s'apprêtait à rendre visite…) et devoir se positionner par rapport au débat éternel quant au conflit entre valeurs esthétiques et valeurs morales. Laissons ce thème comme sujet pour une dissertation du concours général de philosophie…

J’avais obtenu naguère de mes collègues du Haut Comité que nous ne mentionnions pas Brasillach pour le centenaire de sa naissance. Car son œuvre littéraire est mince. Dans le cas de Céline, le cas de figure est autre. Voilà qui aurait pu être une bonne occasion de préciser les règles du jeu. Je souhaite qu’on y revienne bientôt.