22e Festival International du Film d’Histoire de Pessac

Édito de Jean-Noël Jeanneney, Président d’honneur du Festival

La conquête du pouvoir

Pas d’hypocrisie : la conjoncture française, du côté de l’élection présidentielle, a joué son rôle dans le choix du thème que nous avons défini cette année. Rien de plus tonique, en effet, que le recul de l’Histoire, nous le savons bien ici et nous le démontrons depuis deux décennies, rien de plus stimulant pour aiguiser le regard sur des émotions contemporaines et nourrir la sagesse civique, rien de plus instructif que les intuitions et les prestiges du cinéma pour restituer à des combats contemporains leur pleine dimension romanesque, leur plus riche densité humaine.

Certes, et pourtant on s’égarerait à penser que nous allons nous focaliser sur le présent. Ce serait manquer à la vocation qui est la nôtre, celle de parcourir les siècles en stimulant le rapprochement entre l’écrit et l’image autour de passions et d’énergies qui sont de toujours. La quête du pouvoir, au centre de toutes les collectivités, est aussi ancienne que l’humanité, dans l’ordre du politique assurément, mais tout autant de la vie économique et sociale, pour ne pas parler des chocs guerriers et même, (pourquoi pas ?) des compétitions culturelles et médiatiques.

Eh bien ! nous allons, considérant ces affrontements sous notre double focale, nous mettre en quête des ressorts qui animent les ambitions, des procédés qui fondent les succès et des débordements qui expliquent les déconfitures, de la psychologie des acteurs et des entraînements des foules : la Roche Tarpéienne sera constamment présente, bien sûr, à côté du Capitole. Nous allons mettre en lumière la puissance de ce que Voltaire appelait « sa Majesté le hasard » tout autant que l’influence des forces profondes, révélées sous l’apparence de l’aléatoire, quant à l’issue des combats qui se déroulent pour la maîtrise des hommes et des choses.

Il y aura des intrigues étranges et des émotions imprévues, des brutalités et des tendresses, des déterminations sans faille et des aspirations zigzagantes, de multiples traverses rencontrées sur des itinéraires individuels et collectifs –tout ce qu’il faudra, en somme, pour stimuler, enrichis les uns par les autres, les débats de Clio comme le rayonnement des films, bref : pour être fidèle à cette entreprise sans pareille qui nous rassemble indéfectiblement, chaque mois de novembre, au profit d’un bonheur partagé.

Jean-Noël Jeanneney