Entretien au Parisien sur le référendum grec

Comment interpréter le non grec ?

C’est un échec collectif. Mais c’est le choix du peuple grec. Je le respecte, mais je le déplore, car cela va aggraver l’instabilité et l’incertitude en Europe.

Quelle est la part de la responsabilité de l’Europe ?

Nous aurions dû être plus lucides sur les difficultés de l’économie grecque et orienter les financements européens vers la construction d’un système fiscal digne de ce nom en Grèce, il aurait fallu organiser une lutte efficace contre la fraude, qui constitue l’un des principaux fléaux de ce pays. François Hollande plaidait pour un compromis raisonnable de la restructuration d’une partie de la dette en contrepartie de réformes. Mais cela ne faisait pas l’unanimité. Les Grecs ont bien entendu eux aussi leur part de responsabilité.

En quoi les Grecs ont-ils une part de responsabilité ?

Leurs gouvernements successifs ont fermé les yeux sur les maux qui empoisonnaient le pays, la fraude fiscale donc, mais également le clientélisme ou l’injustice. Ils sont responsables de ne pas avoir pris les mesures nécessaires pour restructurer tout le système. Et d’avoir conservé une économie monolithique, pratiquement uniquement tournée vers le tourisme, quand il aurait fallu diversifier les activités et les ressources.

Va-t-on couper les ponts avec la Grèce ?

Surtout pas ! Il faut au contraire tirer les leçons de ce référendum, prendre la mesure de la souffrance du peuple grec, et relancer les négociations dès aujourd’hui. Alexis Tsipras et François Hollande se sont d’ailleurs entretenus par téléphone hier soir.

Cela ne risque-t-il pas de compliquer les relations entre Paris et Berlin ?

Il ne faut pas exagérer les désaccords. Tout le monde est d’accord sur le fait qu’il faudra un jour ou l’autre restructurer la dette, offrir des perspectives à la Grèce et renforcer l’euro. L’Europe n’est pas affaiblie, au contraire. Nous devons maintenant construire une véritable gouvernance économique européenne, avec un budget et une légitimité démocratique.

Mais Alexis Tsipras sort renforcé et va certainement en jouer dans les négociations ?

Pour arriver à un compromis, il faut être deux. Au bout du bout, il devra choisir entre rester et sortir. Or, sortir de la zone euro, c’est voir le pouvoir d’achat chuter de 70 %. Ce serait un drame pour les Grecs. Alors que la zone euro, elle, résistera.

Propos recueillis par Erwan Benezet et Boris Cassel pour Le Parisien.