Le Mali et l’enjeu touareg

Concordance des temps – émission du 2 juin 2012

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Avec Catherine Coquery-Vidrovitch.

Dans nos souvenirs de classe et dans notre imaginaire, les Touaregs ont fière allure. Ces grands hommes bleus progressant majestueusement au dos de leurs dromadaires, le visage recouvert, sauf à hauteur des yeux, pour que le sable ne l’agresse pas, ne laissant aucun conquérant, aucun colonisateur attenter à leur dignité, les Touaregs, frugaux et vaillants, ma génération les a vus dans les vignettes de nos manuels, des les dessins d’Hergé, dans les bandes d’actualités qu’on nous montrait avant le film des cinémas de notre enfance. Mais voici que ces images se brouillent quand ils commencent de brandir des kalachnikovs à l’arrière de half-tracks qui roulent à vive allure. Ils surgissent à présent dans un tout autre équipage, au premier plan de l’attention internationale. Car ils sont partie prenante dans la crise violente qui secoue le Mali, dont ils dominent désormais la partie septentrionale, en association probablement fragile, avec divers groupes islamistes influencés par Al-Qaïda. Leur révolte tire parti de la lutte de pouvoirs qui déchire la capitale, Bamako, au sud, après qu’un coup d’État militaire a renversé le président Touré, légitimement élu et a provoqué ensuite des évènements tumultueux dont l’issue est encore incertaine.

Voilà bien qui donne le goût d’aller chercher dans le passé, jusqu’à des siècles en arrière, ce qu’a été le jeu des forces qui a pu, sur la longue durée, tantôt favoriser l’unité de royaumes dont l’emprise a dépassé largement les limites actuelles du pays, tantôt aiguillonné l’opposition entre les nomades du nord et les sédentaires du sud. Le Mali et l’enjeu touareg : Catherine Coquery-Vidrovitch, professeur émérite à l’Université Paris VII, spécialiste de l’histoire africaine, va nous aider à jeter de la clarté dans la perspective d’aujourd’hui, sur des évolutions pluriséculaires qui, sans elle, risqueraient de nous paraître diablement compliquées.

Jean-Noël Jeanneney